Toute couleur politique confondue, nous nous retrouvons, dans notre activité syndicale, confrontés à une volonté délibérée de certains élus locaux de détourner la loi dans le meilleur des cas, voir de se placer hors cadre législatif et/ou réglementaire, et ce rarement à l’avantage des agents. On assiste ainsi à des réactions qui consistent à invoquer la libre administration des collectivités territoriales pour refuser d’appliquer la loi, à s’afficher comme le maître suprême qui se place au-dessus des lois et s’estime exonéré de toute obligation légale qui les dérange et même d’avoir à exécuter les décisions de justice (Alors quand ils nous rétorquent qu’ils appliquent le jour de carence parce qu’ils sont bien obligés de respecter la loi et qu’ils oublient du même coup la libre administration des collectivités, ça prêterait plutôt à sourire… ou à pleurer !).
Lors des formations organisées pour les dirigeants administratifs de nos collectivités, certains formateurs et/ou avocats conseillent même de ne pas répondre sur les contentieux lorsque ceux-ci sont portés devant les tribunaux (manière très discutable de laisser pourrir des situations et de faire en sorte que les affaires ne se jugent que bien après le départ des protagonistes, quand plus personne n’en a rien à faire ?!) C’est surtout parce qu’ils ont bien compris que, le temps, devant les juridictions administratives, joue très souvent en faveur de la collectivité. En effet, 4 ans après, l’agent non titularisé pour un motif fallacieux, n’aura que faire de sa réintégration dans la collectivité, surtout s’il a oublié de demander une indemnisation du préjudice qu’il aura subi. Ainsi, le premier magistrat de la commune, se retrouve parfois en position de renier la légitimité du troisième pouvoir de la République, en discréditant le pouvoir judiciaire. Nous obtenons des décisions de justice favorables aux agents, comme cette démission requalifiée en droit de retrait et son acceptation, en licenciement, avec obligation de réintégrer l’agent qui 6 mois après n’est toujours pas exécutée. Pour autant, nous pouvons regretter que le pouvoir judiciaire reprenne crédit à ses yeux lorsqu’il s’agit d’organiser la répression syndicale de façon souvent très discutable et que la confraternité retrouve alors du sens pour s’assurer les bonnes grâces des procureurs.
Les exemples sont légions qui révèlent des contournements de la loi, voire parfois de véritables infractions pénales. L’Etat qui a lâché la bride au contrôle de légalité des actes des collectivités s’en est fait complice. Nous connaissons tous les atteintes au statut au service d’un recrutement clientéliste qui multiplient, dans nos collectivités, les contrats précaires de type « saisonnier » (avec parfois de fort longues saisons !) alternant avec des besoins occasionnels (où l’occasion fait souvent le larron des désenchantements !), avec des délibérations créant 50 postes de non-titulaires par an alors que l’effectif total de la commune ne compte que 250 agents en tout. S’y ajoutent parfois des conditions de travail contraires à la sauvegarde de la santé des personnes, avec un maintien sous la pression du chantage au licenciement qui contraint le salarié à s’en satisfaire. L’absence de recours possible à l’inspection du travail autorise ce type d’agissements. Nous n’en sommes nous-mêmes informés souvent qu’a posteriori, lorsqu’enfin la personne a quitté la collectivité et malheureusement pas toujours de son plein gré. Ainsi cette jeune femme élevant seule deux enfants en bas âge obligée d’exécuter des ordres de travail allant jusqu’à 72 heures hebdomadaires, relevant de contrats d’un mois renouvelés, menacée constamment de perdre son emploi, a fini par s’insurger d’être ainsi traitée. Elle ne touche plus aujourd’hui que le RSA, car le maire, offusqué, n’a pas renouvelé son dernier contrat et l’a déclarée démissionnaire auprès des ASSEDIC (vile vengeance !).
Mais les précaires ne sont pas les seules victimes ! Comment qualifier en effet les agissements de ce maire d’un petit village, ancien instituteur du même village, passionné de « bals à papa » qui réquisitionne tous les week-ends gratuitement le personnel communal pour organiser les festivités, et qui lorsque ce même personnel finit par ne plus accepter de travailler ainsi 7 jours sur 7, le contraint à démissionner ?
La précarité financière des populations les plus vulnérables qui ne cesse d’augmenter nous fait craindre que de telles attitudes se développent. Alors que nous avons connu des temps où les communes, institutions au plus près des populations, pouvaient tenir un rôle social en donnant une place respectable aux plus démunis au moyen notamment d’ « emplois réservés », elles réduisent parfois ces mêmes personnes en esclavage en leur fournissant certes du travail, mais en oubliant de les payer (cf. notre article dans le journal du …).
Certains comportements des élus, ou de ceux qui les représentent, vis-à-vis de ces personnels relèvent du chantage ou de l’abus de faiblesse.